Il est deux heures du matin, ils sont une vingtaine de Mildioux, Mildiouses, sympathisants et apparentés. Soudés par les épaules, ils forment un cercle de poètes bien vivants, tanguant, yeux mis clos, ils chantent à pleine voix, plus où moins juste, mais de tout coeur : il faut dire que Petit Louis a allumé la mèche et donné le ton.

De leur gosier humecté, mais sans excès, les chants immémoriaux du répertoire rugbystique montent réchauffer les étoiles de cette nuit d´automne. Derrière son Bar, ému mais digne, Christophe veille au grain…

Pas de sono ni de DJ ni d´effet de lumières sophistiqués : du chant, quelques pas hésitants de kazatchock et des yeux qui brillent en guise de spot light. Qui brillent de la joie simple de se trouver ensembles, alors que tout dans la vie s´ingénie à les séparer : ils ne sont pas du même milieu, ni du même bord, ils sont chevelus, tondus, taiseux, bavards ; ils, ne sont pas nés au même endroit ni de la même pluie, mais qu´importe : ce vendredi soir, ils chantaient d´une même voix le bonheur d´être humain parmi les siens. Ben vrai !

Alors comment expliquer ce pur moment de sage folie ? La plate côte fondante à souhait, choyée dans une sauce à damner un banquier zurichois ? Le Bordeaux choisi avec sérieux et amour ? Le gâteau anniversaire à Toni ? La chorégraphie rougeoyante des barmen étrennant ce superbe polo brodé aux couleurs Mildiouses ?

A moins que ce ne soit la magie irradiante de ce week-end de vendange un peu partout en France ? Mystère… On connaissait les Mystères de Paris, le Mystère Picasso, celui des voix Bulgares, Le Munster « Les P´tits Amis »… eh bien le Mystère d´une troisième mi-temps Mildioux reste entier et beau comme un foie gras frémissant dans sa terrine et ne comptez pas sur moi pour m´en plaindre.

Après une interruption momentanée du son et de l’image, Igor Aglat (notre photo après l’incident) est rentré chez lui en oubliant son polo…
Les deux premières mi-temps disons-le tout net ne furent pas du même tonneau que la 3ème, mais après tout, est-ce si grave ? on a tous bien courru, on étaient bien une bonne grosse vingt-ciquaine à tourner sur le terrain ce qui permit à chacun de jouer sans metre sa santé en danger (si l’on excepte Igor, qui à l’issue du match, arborait un magnifique sparadrap à la commissure des lèvres ainsi qu’un léger air absent dans le regard…).

Nos visiteurs de Vélizy, une valeureuse équipe corpo, étaient venus en avance et en nombre… Fin chauds ils nous servirent une première mi-temps à flux tendu alors que nous donnions l´impression de jouer en alternatifs. Leurs ailiers rapides comme une gorgée de Get bien frais, firent quelques aller et venus et c´est tout juste si nous réussîmes à planter un essai ; et comme je parlais de vendange, j´ai, je le confesse, bêtement laissé passer ma chance de payer ma bouteille au bar suite à une belle percée de Jean-Noël.

Heureusement la deuxième mi-temps fut tout de même plus acceptable, nos avants donnèrent un peu de la voix : les Kiki, les Mimi, les Phiphi mirent leur grosses papattes sur les regroupements ; la domination territoriale fut au rendez-vous, mais, mais, les incursions Véliziennes bien que beaucoup plus rares étaient toujours aussi efficaces, las…

Il est vrai que la fougue d´Alain Rouault, la défense et le crochet musclés d´Alain Thorin étaient excusés ce vendredi là, que Jean-Luc Beney était aux vendanges dans sa famille, que Sergio en tant qu´enseignant et cinéphile était pris par un colloque frénétique et que Fred Barreyre commence singulièrement à manquer à l´organisation de nos gros bras, il vrai que l´on est toujours sans nouvelles de Fanfan Garnier et que certains, comme Daniel et Nicolas, honoraient leur première sélection en Mildioux, après une abstinence rugbystique de 25 ans…

Il est vrai aussi que nous ne sommes que fin septembre : notre nouveau coach treiziste dédié à la défense n´a pas encore obtenu de visa depuis l´hémisphère sud et en outre, la mise en place en touche n´a pas fait, autant vous l´avouer, l´objet d´un travail très approfondi lors des derniers entraînements.

Bon et bien sûr l´éternelle, la languissante question de la moyenne d´âge peut aussi expliquer certaines absences ah oui… oui… oui… qu´est-ce que je disais déjà ? Bref, il est vrai. Mais il est vrai aussi que nous avons manifesté un empressement au plaquage quelque peu déficient, à quelques belles exceptions près : Martial, alors qu´il était sur le point de se commander un demi, revint du diable veau vert pour fracasser sur la ligne les espoirs naïfs d´un Vélizois qui avait curieusement échappé à la vigilance de toute la ligne de ¾… Quant à David, toujours aussi chaleureux, il n´eut de cesse de serrer tous ses adversaires dans ses bras.

De toutes façons, rien ne pourra enlever le succès total de la 3ème mi-temps qui suivit. Imaginez un peu le tableau, façon école hollandaise, tendance kermesse héroïque : une tablée de 40 décidée à s´amuser d´un rien ! Et encore quelque chose me dit que si nous avions écourté l´apéro au profit du pousse dessert pour passer à table plus tôt, nos amis de Vélizy auraient pu rester plus nombreux à dîner. Mais, soyons sérieux, écourter l´apéro, autant essayer de demander à Phiphi de pas rentrer trop tard…

La phrase du jour :

« Pour Vitry : hip ? hip ? hip ? euh… hip ? »